Ce mardi 17 juin, les États-Unis ont franchi un cap décisif : le Sénat a adopté le tout premier projet de loi encadrant l’univers des cryptomonnaies, et plus précisément les stablecoins. Ce texte, baptisé Genius Act (pour Guiding and Establishing National Innovation for U.S. Stablecoins Act), a été largement porté par Donald Trump, dans une logique assumée de renforcement du dollar américain sur les marchés numériques. L’objectif est clair : créer un cadre réglementaire rassurant pour attirer les capitaux, encourager l’innovation nationale, tout en gardant un œil sur la sécurité financière du pays. Et autant le dire tout de suite, ce vote pourrait bien changer la donne dans l’univers crypto, pas seulement aux États-Unis.
Avant d’entrer dans le vif du sujet, faisons une petite pause pédagogique. Un stablecoin, c’est une cryptomonnaie un peu particulière. Contrairement au Bitcoin ou à l’Ethereum, qui peuvent voir leur valeur grimper ou chuter de manière parfois spectaculaire, un stablecoin est… stable (comme son nom l’indique). Il est adossé à une monnaie classique, comme l’euro ou le dollar. Concrètement, si vous avez un stablecoin indexé sur le dollar, sa valeur sera toujours proche de 1 dollar.
Pourquoi c’est utile ? Parce que ça permet de profiter des avantages des cryptomonnaies (vitesse, transparence, autonomie) tout en évitant leur volatilité. Pour ceux qui veulent envoyer de l’argent à l’autre bout du monde, investir ou stocker des fonds dans un environnement décentralisé, sans craindre de tout perdre en une nuit à cause des fluctuations du marché, les stablecoins sont devenus une solution incontournable.
Ce texte apporte plusieurs changements majeurs qui vont structurer l’écosystème autour de ces cryptomonnaies stables. Voici ce qu’il faut retenir :
Le timing du Genius Act n’a rien d’un hasard. Le marché des stablecoins représente aujourd’hui environ 260 milliards de dollars, dominé par deux acteurs américains : USDT de Tether (155 milliards de dollars) et USDC de Circle (61 milliards). Selon Scott Bessent, secrétaire au Trésor, ce chiffre pourrait atteindre les 3.700 milliards d’ici la fin de la décennie. Mais au-delà des volumes, il y a une stratégie : utiliser les stablecoins pour renforcer l’attractivité du dollar à l’échelle mondiale. En effet, la plupart de ces actifs numériques sont soutenus par des bons du Trésor américain. Plus la demande de stablecoins augmente, plus les États-Unis peuvent vendre leurs bons, ce qui réduit le coût de leur dette.
Malgré les félicitations de l’industrie crypto, tout le monde n’est pas ravi. Certains élus, comme la sénatrice démocrate Elizabeth Warren, dénoncent une réglementation jugée “trop légère”. Elle craint que ce texte n’ouvre la voie à de nouvelles dérives, en rappelant les mécanismes de dérégulation financière qui ont conduit à la crise de 2008. Pour elle, le Genius Act donne l’illusion d’un cadre sécurisé tout en offrant trop de libertés aux entreprises. “Pourquoi l’industrie réclame-t-elle une réglementation ? Elle veut une couverture gouvernementale sans contrôle réel”, a-t-elle déclaré.
Si vous investissez dans les cryptos ou suivez l’actualité du secteur, ce texte marque un tournant. Il montre que les États-Unis ne veulent plus rester spectateurs face à l’essor des monnaies numériques. Et cela aura des répercussions bien au-delà de leurs frontières.
Le Genius Act a passé l’étape du Sénat, mais le parcours législatif n’est pas terminé. La Chambre des représentants doit encore se prononcer. Elle peut soit valider le texte en l’état, soit proposer une version modifiée. Une chose est sûre : Donald Trump veut que tout soit signé avant le mois d’août. En ligne de mire ? Une victoire politique et symbolique, en pleine campagne.
Dans les coulisses, des discussions intenses sont en cours. Si le compromis est trouvé, les États-Unis deviendront officiellement le premier pays à avoir légiféré spécifiquement sur les stablecoins. Une révolution silencieuse… mais stratégique.